Les atouts durables de la pierre sèche
Restaurer d'anciens murs en pierre sèche pourrait devenir une activité dynamique du secteur de la maçonnerie traditionnelle. Le marché s'épanouit ces cinq dernières années.
Les constructions en pierre sèche ne courent pas les rues, et pour cause puisque ce type de maçonneriepierre1-373.jpg est typiquement rural. Il n'est pas rare de rencontrer de superbes paysages façonnés en terrasses par la main de l'homme dans de nombreuses régions de France. Ou encore des murs, souvent impressionnants d'épaisseur et de hauteur, bordant des chemins, des champs ou des ruelles de villages. Beaucoup moins accessibles sont les cabanes de pierre sèche, disséminées dans les coins les plus reculés de la campagne française, les citernes couvertes, les ruchers… Ces " aménagements lithiques " sont édifiés selon une technique d'assemblage de pierres sans mortier qui a bien failli disparaître après guerre, avec la mode du " tout béton ". Heureusement, quelques passionnés se consacrent depuis des années à redécouvrir ce savoir paysan, en démontrant et en étudiant les constructions qui ont résisté au temps.
UNE TECHNIQUE DE 'PAUVRES'
La pierre sèche est, avant tout, une technique de constructrion de pauvres. La chaux nécessaire aux liants a un coût, et il faut la transporter, tandis que la pierre est partout. Quoi de plus logique que de l'utiliser à créer des murs pour retenir la terre dans les reliefs accidentés, pour séparer les parcelles ? De là à édifier, à proximité, des cabanes servant de remise à outils, d'abri pour les saisonniers, d'étable, ou de bergerie, il n'y a qu'un pas, un peu technique il est vrai, à franchir. Si l'idée de construire en amassant des pierres les unes sur les autres est pratiquée dans quasiment toutes les civilisations, les ouvrages de pierre sèche tels que nous les connaissons datent dans leur immense majorité de la fin de l'ancien régime (deuxième moitié du XVIIIème siècle) jusqu'à la fin du Second Empire (premier tiers du XIXème). Des constructions antérieures au XVIIIème siècle existent sur le causse du Quercy et dans les garrigues du Gard (le fer est rare avant le milieu du XVIIIème et les outils peu adaptés au dérochement et à l'empierrement). La technique perdure jusqu'au début du XXème siècle.
LES CABANES: VOUÉES À DISPARITRE
Il importe de distinguer les cabanes des murs, qu'ils soient murs de soutènement ou de clôture. Les premières appartiennent définitivement au passé, au folklore. Leur restauration est le fait de particuliers amoureux de leur patrimoine, d'associations de conservations du patrimoine, de communes… En ruines, pour la plupart, elles sont vouées à disparaître dans les décennies à venir. En revanche, les murs trouvent leur utilité dans le quotidien. La plupart soutiennent des terrasses à vocation agricole. Leur restauration représente une niche économique qui se développe ces 5 dernières années. Outre l'agriculture, le tourisme est aussi moteur puisqu'il stimule l'intérêt pour ces ouvrages via les chemins de randonnée qui sont, dans bien des cas, renforcés par des " calades ", empierrements du sol à la verticale, en pierre sèche et parfois en galets, à proximité des rivières. Dans les régions montagneuses, de nombreux petits barrages poids, des bergeries, des murs paravalanche, sont d'autres exemples d'ouvrages en pierre sèche à entretenir. Dans un autre registre, le réseau routier représente un futur marché. Une étude de la Direction des routes montre que 20% des murs de soutènement du réseau routier national seraient constitués de pierre sèche. Des efforts devraient être entrepris pour conserver ces ouvrages qui permettent le ruissellement des eaux entre les pierres. Enfin, un autre créneau, non négligeable, celui des aménagements d'espaces verts et de jardins paysagers, avec des terrasses et autres murets décoratifs (dans le Luberon et les Alpilles surtout).